Quoi faire si vous découvrez des vices cachés ?

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24 avril 2018 Immobilier et construction

Vous venez tout juste de faire l’acquisition d’une nouvelle propriété que vous entendez rénover dans les semaines suivant son acquisition. Alors que vous débutez vos rénovations, vous effectuez des travaux de dégarnissage des murs du sous-sol et constatez alors la présence de moisissures, de matériaux pourris ainsi que des infiltrations d’eau.

Vous pensez alors être en présence de vices cachés. Que devez-vous faire?

Avant de poursuivre la lecture de cet article, il est important de préciser qu’un vice n’est pas automatiquement un vice couvert par la garantie légale de qualité : le vice doit impérativement respecter les 4 conditions spécifiquement prévues par la loi et qui sont expliquées dans la présente vidéo.

Le présent article vise à exposer la marche à suivre en cas de découverte de vices cachés dans un immeuble :

  1. Arrêtez immédiatement les travaux et prenez des photos des vices/dommages que vous avez constatés. N’effectuez pas de travaux correctifs jusqu’à nouvel ordre : il importe de permettre au vendeur de pouvoir constater lui-même les lieux tels qu’ils l’étaient lors de votre découverte des vices/des dommages, sauf en cas d’urgence (par urgence, on parle d’une situation qui implique un risque de perte ou de dépérissement immédiat du bien).
  2. Dénoncez immédiatement le vice par écrit à votre vendeur et les dommages que vous avez découverts : la loi exige une dénonciation écrite. Vous devez accorder un délai raisonnable à votre vendeur pour lui permettre de venir constater les vices et les dommages qui lui ont été dénoncés afin de lui donner l’opportunité de déterminer s’il s’agit bel et bien de vices cachés couverts par la garantie légale de qualité et lui donner l’opportunité de pouvoir les réparer lui-même, à moindre coût.
  3. Accordez un délai raisonnable à votre vendeur pour lui permettre de venir constater les vices sur place et/ou corriger les vices. N’imposez pas de délais inutilement déraisonnables à votre vendeur pour lui permettre d’accéder à votre propriété afin qu’il puisse constater/expertiser les vices que vous lui avez dénoncés.
  4. Après avoir dénoncé, ne procédez pas à l’exécution des travaux correctifs avant d’avoir permis à votre vendeur de venir constater sur place les vices et de pouvoir faire expertiser lesdits vices par son expert : autrement vous risquez de compromettre votre recours pour vices cachés contre votre vendeur.
  5. Communiquez avec un expert afin de déterminer la cause des dommages/la nature du ou des vice(s) : demandez-lui son opinion d’expert, préférablement sous forme de rapport écrit, sur la nature des vices et les dommages causés par ceux-ci. Demandez à votre expert de vous indiquer quels sont les travaux correctifs strictement nécessaires afin de corriger les vices et les dommages causés par ceux-ci. Demandez-lui également de vous fournir son opinion sur le taux de dépréciation applicable en fonction de l’âge de la composante atteinte par le vice et sa durée de vie utile (la garantie légale de qualité n’étant pas une garantie valeur à neuf, la réduction du prix de vente à laquelle aurait droit un acheteur en vertu de la garantie légale de qualité n’équivaut pas automatiquement au coût des travaux correctifs requis : il faut tenir compte de la plus-value apportée par le remplacement d’une composante âgée par une neuve, par exemple un drain français, d’où la nécessité de déterminer le taux de dépréciation applicable, le cas échéant).
  6. Obtenez une soumission de la part d’un entrepreneur afin d’estimer les coûts des travaux correctifs requis pour corriger les vices. Ces travaux ne doivent pas avoir pour effet d’améliorer la propriété : ces travaux doivent être ceux strictement requis pour corriger les vices et les dommages causés par ces derniers. Une réclamation pour vices cachés ne peut servir à obtenir le remboursement de travaux qui ont pour effet d’améliorer l’immeuble.
  7. Advenant qu’aucune entente avec votre vendeur ne soit imminente ou possible suite à votre dénonciation initiale, transmettez alors une lettre de mise en demeure à votre vendeur par laquelle vous lui demanderez formellement de faire procéder, à ses frais, aux travaux correctifs requis pour corriger les vices, ou encore de vous verser un montant équivalent au coût des travaux correctifs requis, en tenant compte de la dépréciation applicable. Vous devez accorder un délai raisonnable à votre vendeur pour qu’il puisse s’exécuter. Le défaut de mettre en demeure votre vendeur avant d’effectuer/de faire effectuer les travaux correctifs peut être fatal à votre recours.  Attention : l’obligation de dénoncer le vice et de mettre en demeure son vendeur de procéder aux travaux correctifs sont deux obligations distinctes qui ont des objectifs distincts.
  8. Communiquez à votre vendeur toute information/précision ou document raisonnablement requis par ce dernier afin de pouvoir lui permettre de compléter son analyse de votre réclamation : collaborez avec votre vendeur à ce niveau. Nous vous recommandons de faire preuve de collaboration et de transparence avec votre vendeur afin de lui permettre d’analyser le bien-fondé de votre réclamation, ce qu’il a le droit de faire. Plus particulièrement, communiquez à votre vendeur votre rapport d’expertise, vos soumissions et estimés que vous avez obtenus ainsi que votre rapport d’inspection préachat. Tôt ou tard, ces documents devront être communiqués à votre vendeur : nous vous recommandons donc de le faire dès que possible. Ce n’est pas en dissimulant de l’information à votre vendeur que vous réglerez votre dossier plus rapidement.
  9. Il sera nécessaire de dénoncer par écrit à son vendeur tout nouveau vice ou toute aggravation du vice, ce qui implique de devoir lui accorder de nouveau un délai raisonnable pour lui permettre de venir constater le nouveau vice ou le vice aggravé et pouvoir procéder à toute expertise que le vendeur jugera nécessaire de devoir faire effectuer dans les circonstances.
  10. Si votre vendeur fait défaut de faire suite à votre mise en demeure, nie sa responsabilité, refuse ou fait défaut d’effectuer les travaux correctifs requis ou encore s’il refuse de vous indemniser pour le coût d’exécution de ceux-ci, vous pourrez alors procéder à l’exécution des travaux correctifs, mais seulement après l’expiration d’un délai raisonnable après la réception de la mise en demeure par votre vendeur. Assurez-vous toutefois que votre vendeur a bel et bien reçu votre mise en demeure et d’en conserver la preuve. Toutefois, avant de procéder à l’exécution des travaux correctifs, nous vous recommandons au préalable de consulter un avocat.
  11. En cas d’impossibilité de pouvoir en venir à une entente avec votre vendeur, vous pourrez entreprendre des procédures judiciaires contre votre vendeur. Le recours à un avocat s’avère toutefois primordial pour bien évaluer votre recours, son bien-fondé, vos chances de succès ainsi que pour déterminer la valeur économique réelle de votre réclamation. N’oubliez pas qu’un recours judiciaire pour vices cachés doit être entrepris dans les trois ans suivant la découverte du vice, à défaut de quoi le droit de poursuivre disparaîtra.

En terminant, n’oubliez pas qu’environ 90% des litiges judiciarisés se règlent à l’amiable. Il est notamment possible pour les parties impliquées dans des procédures judiciaires de participer à une séance de médiation judiciaire, communément appelée conférence de règlement à l’amiable ou CRA

Les règles en matière de vices cachés, d’apparence simples, sont nombreuses et complexes et renferment de nombreux pièges, vers lesquels des automatismes peuvent mener. Advenant la découverte de ce que vous croyez être des vices cachés, nous vous recommandons de consulter immédiatement un avocat avant de poser quelque geste que ce soit.

Ce bulletin fournit des commentaires généraux sur les développements récents du droit. Il ne constitue pas un avis juridique et aucun geste de nature juridique ne devrait être posé sur la base des renseignements qu'il contient.

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