Un recours pour vices cachés est déclaré abusif par le tribunal : des acheteurs sont condamnés à verser à leurs vendeurs qu’ils ont poursuivis une somme de plus de 100 000 $ pour les honoraires extrajudiciaires

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21 juin 2018 Immobilier et construction

Ce billet publié sur le blogue sur les vices cachés des Éditions Yvon Blais le 5 juin 2018 traite de de la décision Tremblay c. Internoscia (Texte intégral | Fiche Quantum), rendue par la Cour supérieure en 2017, et dans laquelle des acheteurs ayant poursuivi leurs vendeurs pour vices cachés furent condamnés à leur verser une somme de plus de 100 000,00 $ pour les frais d’avocats qu’ils eu à encourir dans le cadre de ce recours que le tribunal a déclaré comme étant abusif.

Dans cette affaire, la quasi-totalité de la réclamation des acheteurs, d’un montant de 528 549,15 $, fut rejetée. Il importe de préciser que la propriété en cause avait été préalablement acquise par les acheteurs pour un prix d’achat de 390 000,00 $.

Après une longue étude des différents montants réclamés en lien avec les diverses problématiques et vices en cause (le jugement fait 257 paragraphes), le tribunal accorde aux acheteurs la somme de 684,78 $, dont 3,39 $ pour un thermomètre de piscine, 200 $ pour la réparation d’une pompe septique, un montant de 20 $ pour l’installation de moulures et 461,39 $ pour la coupe du gazon.

Se prononçant sur la demande reconventionnelle des vendeurs, le tribunal en vient à la conclusion que le recours des demandeurs était mal fondé et abusif, ce qui justifiait en l’instance l’octroi de dommages, notamment le remboursement des honoraires extrajudiciaires engagés par les défendeurs pour se défendre à l’égard de ce recours considéré comme abusif. Plus particulièrement, la quasi-totalité des réclamations des demandeurs faites sur la base de la garantie légale de qualité n’étaient pas fondées, vu notamment la connaissance par ces derniers de l’existence de ces vices qui avaient été préalablement dénoncés dans le rapport d’inspection préachat.

Au surplus, plusieurs des vices et problématiques allégués n’ont pas été considérés comme étant graves : la valeur pécuniaire de nombreux vices et problématique était très limitée, sans compter le fait que plusieurs des vices et problématiques invoqués par les acheteurs n’avaient pas été précédés d’une dénonciation, ou encore avaient été dénoncés tardivement, sans compter que certains éléments de la réclamation des acheteurs n’ont fait l’objet d’aucune preuve au procès.

Les demandeurs ont réclamé entre autres une série de réclamations insignifiantes ou de peu d’importance pour lesquelles les défendeurs ont eu à répondre, ce qui a nécessité que le tribunal prenne du temps de cour pour régler « des peccadilles ».

Les demandeurs ont également soumis des réclamations importantes en dommages, réclamations qui n’avaient aucune base factuelle dans la preuve soumise par ceux-ci, alors que d’autres réclamations étaient clairement interdites aux termes des ententes contractuelles intervenues entre les parties.

La sanction du tribunal à l’égard des acheteurs a été draconienne : ces derniers ont été condamnés au remboursement complet des honoraires extrajudiciaires payés par les défendeurs, ce qui représente une somme totale de 108 648,90 $, en plus de devoir verser des dommages compensatoires additionnels.

Ce qu’il faut retenir de cette décision, c’est que les tribunaux n’hésitent plus à sanctionner sévèrement des procédures abusives et à sanctionner l’auteur de l’abus par le remboursement des honoraires extrajudiciaires que ses procédures abusives ont fait engager à l’autre partie.

Malheureusement, on voit encore (trop souvent, de l’avis de la soussignée) des recours où des acheteurs poursuivent leurs vendeurs pour des vices apparents et souvent identifiés dans le rapport d’inspection préachat, ou encore pour des vices n’entraînant aucun déficit d’usage, sans compter les nombreux cas où les acheteurs réclameront la quasi-remise à neuf d’un immeuble âgé sans appliquer de dépréciation quelconque, forçant les vendeurs à se défendre à grands frais à l’égard de recours souvent mal fondés en droit et voués à l’échec, ou encore à l’égard de recours où les montants réclamés sont disproportionnés par rapport à la valeur économique réelle que l’acheteur réclame. Une réclamation pour vices cachés ne doit pas devenir un instrument de renégociation a posteriori d’une transaction alors que les vices étaient apparents, ou sont sans gravité ou encore insignifiants.

Ce bulletin fournit des commentaires généraux sur les développements récents du droit. Il ne constitue pas un avis juridique et aucun geste de nature juridique ne devrait être posé sur la base des renseignements qu'il contient.

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